Michelet dans Michon

J’ai commenté dans un article sur les trois premiers chapitres des Onze (« Corentin le fils, le sixième de peintre de Pierre Michon », Dalhousie French studies, n °87) cette merveilleuse phrase du chapitre III à propos de Couthon : « Au beau milieu de l’éclat jaune Couthon, dont on a un drame plein de sesibilité et de larmes (vous en avez déjà oublié le titre, Monsieur, que pourtant vous avez lu dans la petite antichambre), larmes et sensibilité prodiguées pour rien dans la noire Clermont d’Auvergne, pour des publics de basalte… ».

Voici mon commentaire :

« Quant à l’infirme dans son halo jaune, « solaire », Couthon, auteur « d’un drame plein de sensibilité et de larmes […], larmes et sensibilité / prodiguées pour rien / dans la noire Clermont d’Auvergne / pour des publics de basalte » (28), la phrase qui lui est consacrée résume magnifiquement son destin : le boitement des impairs (7/5/7/7) cassant l’ampleur pleine d’espoir des 12 syllabes initiales. »

Or, en lisant l’Histoire de la révolution française de Michelet (Bibliothèque de la Pléiade, vol 2, page 597), je tombe par hasard sur cette phrase : « Couthon, comme Robespierre, avant 89, était un philanthrope, bien plus qu’un révolutionnaire. On a de lui un drame [qu’il écrivait alors], plein de sensibilité et de larmes, dans le genre de La Chaussée. » Il faut être Michon pour détecter dans les milliers de pages de Michelet ce quasi alexandrin et en faire le résumé des espoirs de jeunesse de l’écrivain Couthon, espoir brisé ensuite dans le ryhtme même de la période. C’est magnifique.

About Annie Mavrakis

Agrégée de lettres et docteur en esthétique, Annie Mavrakis a publié de nombreux articles ainsi que deux livres : L'atelier Michon (PUV, février 2019) et La Figure du monde. Pour une histoire commune de la littérature et de la peinture (2008).

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